Alors que le continent africain fait face à des défis environnementaux majeurs tels que la pollution plastique, les déchets électroniques croissants et la dégradation des ressources naturelles, une vision novatrice émerge. Il s’agit d’une économie circulaire africaine capable de générer de la prospérité tout en protégeant la planète.
Mais cette vision se décline en deux cadres stratégiques complémentaires qui peuvent sembler confus au premier abord. Le Plan d’action continental pour l’économie circulaire (CEAP) de l’Union africaine (2024-2034) et les priorités de l’Alliance africaine pour l’économie circulaire (ACEA) communément appelé 5 Big Bets.
Ces deux approches ne sont pas en concurrence. Elles se renforcent mutuellement. Le CEAP est la feuille de route continentale complète tandis que les 5 Big Bets représentent un focus stratégique et opérationnel sur les secteurs à plus fort potentiel de transformation immédiate. Comprendre cette distinction est crucial pour tout décideur politique, entrepreneur, investisseur et citoyen africain qui cherche à saisir comment le continent compte transformer son économie dans les dix prochaines années.
Le Plan d’action continental de l’Union africaine
Lancé récemment par la Commission de l’Union africaine, le CEAP 2024-2034 est bien plus qu’un document politique. C’est la première feuille de route continentale intégrée pour transformer l’économie africaine selon les principes de la circularité. En d’autres termes, c’est la vision globale de l’Afrique.
Le CEAP couvre 8 secteurs prioritaires organisés en deux catégories dont 3 secteurs horizontaux (l’eau, les déchets, l’énergie) et 5 secteurs verticaux (agro-industrie et pêche, transports et mobilité, tourisme, industrie,exploitation minière).
Pourquoi cette distinction horizontale/verticale ?
Les secteurs horizontaux sont essentiels parce qu’ils constituent l’infrastructure circulaire de base. Par exemple
L’eau : aucune activité économique circulaire n’est possible sans gestion efficace de l’eau. La circularité exige la réutilisation, le recyclage et la gestion des eaux usées.
Les déchets : c’est le cœur même de l’économie circulaire. Sans infrastructures adéquates pour traiter, trier et valoriser les déchets, aucune circularité n’est possible.
L’énergie : les systèmes circulaires consomment de l’énergie. Ils doivent être alimentés par des sources renouvelables pour être véritablement durables.
Les secteurs verticaux, en revanche, sont les applications concrètes où la circularité génère de la valeur économique mesurable. Pour chaque secteur, le CEAP définit des objectifs clairs :
Pour l’eau :
-Renforcer les cadres politiques aux niveaux continental, régional et national
-Mettre en place des infrastructures pour la consommation d’eau douce et l’assainissement
-Promouvoir l’utilisation efficace de l’eau et sa réutilisation
Pour les déchets :
Renforcer les cadres politiques et stratégiques sur l’économie circulaire
Investir dans des infrastructures de traitement sûr des déchets
Mettre en œuvre un cadre statistique environnemental efficace
Pour l’énergie :
Un cadre ambitieux et exhaustif
Renforcer les mesures de décarbonisation et d’efficacité énergétique
Produire de l’énergie à partir de technologies alternatives (digestion anaérobie, énergies renouvelables)
Encourager l’incorporation d’énergie renouvelable dans l’industrie et le commerce de détail
Pour les secteurs verticaux, les objectifs sont tout aussi détaillés et ambitieux.
Au-delà des 8 secteurs : les éléments transversaux
Le CEAP ne se limite pas aux 8 secteurs. Il identifie également des éléments habilitants et transversaux essentiels :
L’inclusivité : assurer que la transition circulaire bénéficie à tous, y compris les populations marginalisées
Le commerce : harmoniser les normes et faciliter le commerce régional de matériaux circulaires
La collaboration et la capacité industrielle régionale : renforcer la coopération Sud-Sud et les chaînes de valeur régionales
L’éducation et le développement des capacités : former les travailleurs et entrepreneurs à l’économie circulaire
Le financement et l’aide aux entreprises : mobiliser les ressources financières pour soutenir la transition.
Le CEAP est comme la stratégie globale d’un gouvernement. Elle couvre tous les domaines politiques et tous les défis du pays.
Les 5 Big Bets sont comme les priorités exécutives du gouvernement. Les domaines où le gouvernement concentre ses ressources, son attention et ses efforts pour des résultats immédiats et tangibles.
Les 5 Big Bets de l’ACEA
Si le CEAP est ambitieux et complet, l’ACEA a fait un choix stratégique : concentrer ses efforts, ses ressources et ses partenariats sur 5 secteurs spécifiques où elle estime pouvoir générer le plus d’impact économique, social et environnemental à court et moyen termes.
Ces 5 Big Bets sont :
- Systèmes alimentaires et agro-industrie
- Emballage et plastique
- Mode et textiles
- Électronique et déchets électroniques
- Construction
Le choix n’est pas arbitraire. Ces cinq secteurs ont été identifiés parce qu’ils combinent plusieurs facteurs :
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Potentiel économique élevé. Ces secteurs représentent des chaînes de valeur massives en Afrique, générant des milliards de dollars en revenus annuels.
Ces secteurs ont été identifiées par l’Alliance pour l’économie circulaire en Afrique comme ceux offrant des possibilités immédiates pour améliorer la circularité tout en stimulant l’économie, l’emploi et la préservation de l’environnement sur le continent.
En Afrique, chaque dollar investi et chaque effort déployé en faveur de l’économie circulaire contribue à 11 millions de nouveaux emplois, moins 60% d’émissions de gaz à effet de serre et un impact positif sur les 17 objectifs de développement durable.
Les 5 Big Bets de l’ACEA sont inclus dans le CEAP, mais ils ne représentent qu’une partie de la vision continentale. Le CEAP de l’Union africaine et les 5 Big Bets de l’ACEA ne sont pas en concurrence. Ils sont complémentaires. Le CEAP fournit le cadre stratégique global, la vision complète de ce que pourrait être une Afrique circulaire dans tous les domaines économiques.
Les 5 Big Bets fournissent le focus opérationnel, la concentration de ressources et d’efforts sur les secteurs où l’ACEA peut catalyser un changement rapide et démontrer la viabilité commerciale de la circularité.
Ensemble, ces deux approches positionnent l’Afrique non pas comme suiveur passif des tendances mondiales, mais comme acteur majeur dans la définition de l’économie circulaire du XXIe siècle.
La rédaction
