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Révolution verte : la Côte d’Ivoire transforme ses forêts en atouts climatiques et économiques.

À travers le mécanisme REDD+, la Côte d’Ivoire transforme ses forêts en atouts climatiques et économiques. Ce projet, qui combine reboisement, agroforesterie et paiements pour services écosystémiques, vise non seulement à réduire les émissions de CO2, mais aussi à générer des revenus pour les communautés locales.

 La REDD+ (Réduction des Émissions issues de la Déforestation et de la Dégradation des forêts) est une initiative internationale visant à lutter contre le changement climatique en récompensant les pays pour leurs efforts de conservation et de restauration des forêts. Pour encourager les pays à aller au-delà de la simple prévention de la déforestation et de la dégradation, la REDD+ inclut des efforts de renforcement des stocks de carbone, tels que la plantation d’arbres dans les cacaoyères et autres plantations. Une évaluation est effectuée pour suivre l’évolution des forêts et des émissions. Ce système de paiement pour services écosystémiques (PSE) rémunère la protection des forêts.

Selon le Spécialiste en Mesure Notification et Vérification (MNV) en matière de REDD+, Elie Kouman qui s’est exprimé au cours d’un panel organisé récemment à Abidjan-Cocody autour du thème : « le Financement carbone et la restauration des écosystèmes forêts en Côte d’Ivoire : enjeux et engagement des parties prenantes », « Sans les programmes REDD+, les pertes seraient importantes ».

Les phases du mécanisme REDD+

Ce mécanisme auquel la Côte d’Ivoire a adhéré en 2011, se déploie donc en trois phases. La  phase de préparation qui s’est déroulée entre les années 2011 et 2020.  Cette période a consisté à mettre en place les outils nécessaires, à former les acteurs et à développer une stratégie nationale pour la REDD+. Cela prend en compte la collaboration de divers acteurs nationaux pour établir une base solide pour les futures activités.

La phase d’investissement qui implique la mise en œuvre d’activités concrètes visant à réduire les émissions de CO2, telles que le reboisement, l’agroforesterie et la conservation des forêts. 

Puis, la phase de paiement, actuellement en cours, qui consiste à capitaliser sur les activités menées précédemment et à redistribuer les paiements basés sur les réductions d’émissions réalisées.

Le programme de paiement des réductions d’émissions de gaz à éffet de serre

Le Programme de Paiement des Réductions d’Émissions de Gaz à Effet de Serre (PRE) est l’un des projets de la REDD+. Il vise à réduire les émissions de CO2 autour du Parc National de Taï à travers diverses activités menées dans les cinq régions de la zone. Il prévoit également de vendre ces réductions, générant ainsi des revenus qui seront redistribués aux différents acteurs impliqués (communautés locales, entreprises..). Ce programme s’inscrit dans une période allant de 2020 à 2024, avec une prolongation prévue jusqu’en 2025.

Bilan de la première Phase

Selon Elie Kouman, spécialiste en Mesure, Notification et Vérification (MNV) en matière de REDD+, la première phase du projet, couvrant « une vaste zone de 4,6 millions d’hectares, englobant cinq régions, deux parcs nationaux (Taï et Mont Péko), deux réserves naturelles et 23 forêts classées », a permis de capitaliser 7 millions de tonnes équivalent CO2 sur la période de 2020 à 2021. Le contrat prévoyait initialement une réduction de 10 millions de tonnes équivalent CO2 d’ici 2024.

Pour ce faire, le pays vient de bénéficier de 35 millions de dollars pour la première période, soit plus de 18 milliards FCFA. Cette somme sera redistribuée à tous les acteurs de la chaîne, selon des critères d’éligibilité préalablement établis avec les parties prenantes. « La redistribution des revenus se fera à 50% pour les bénéficiaires directs (individus, ONG, communautés, collectivités, particuliers), 25% pour les bénéficiaires indirects essentiels au projet comme la Société de développement des forêts (SODEFOR), l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves (OIPR)) et 25% pour les autres bénéficiaires indirects comme les conseils régionaux, l’Agence Nationale de l’Environnement (ANDE) », a-t-il indiqué.

Poursuivant, il ajoute  « les activités éligibles dans le cadre du projet incluent la conservation (c’est-à-dire les populations locales qui souhaitent conserver leurs forêts naturelles), le reboisement (les initiatives de reboisement) et l’agroforesterie (les pratiques d’agroforesterie, notamment dans les plantations de cacao) ».

Évaluation du PRE

Pour évaluer les données de réduction des émissions de CO2 dans le cadre du PRE, la Côte d’Ivoire utilise une combinaison de technologies avancées et de méthodes de collecte de données rigoureuses, telles que l’utilisation d’images satellitaires et les enquêtes sur le terrain. « Les données collectées ont permis d’estimer le carbone total réduit. Ensuite, un appel à manifestation d’intérêt a été lancé pour identifier les producteurs, particuliers et villageois ayant participé au reboisement ou à la conservation. Conscient des défis d’accès à Internet dans les villages, des missions ont été envoyées par des services de l’État comme la SODEFOR et l’OIPR pour intégrer les données dans le système développé. Les inscriptions ont eu lieu du 15 décembre 2023 au 15 juin 2024. Actuellement, les données sont en cours de traitement pour assurer la qualité et l’absence de chevauchement des parcelles. La décision de paiement sera prise par la Côte d’Ivoire, mais les fonds sont déjà disponibles », a-t-il détaillé.

À l’échelle mondiale, il s’agit du sixième projet juridictionnel accepté pour recevoir des paiements. En Afrique, seuls quelques pays comme le Cap-Vert, le Mozambique, Madagascar, le Ghana et la Côte d’Ivoire ont atteint ce niveau. Le PRE est considéré comme un projet pilote, permettant de tirer des leçons pour d’autres projets futurs. « Malgré l’engouement suscité, il reste beaucoup à faire en matière de communication et de compréhension des mécanismes de réduction des émissions. L’État avance prudemment pour éviter les projets préjudiciables et vise à établir une réglementation solide autour des projets carbone », a-t-il conclu.

Le contrat entre la Côte d’Ivoire et la Banque mondiale dans le cadre du REDD+ vise à réduire les émissions de CO2 en Côte d’Ivoire. Le pays s’engage à réduire 10 millions de tonnes d’équivalent CO2 d’ici 2024, avec une option pour la Banque mondiale d’acheter jusqu’à 6,5 millions de tonnes supplémentaires si les réductions dépassent les prévisions initiales.

Marina Kouakou